Réacteurs nucléaires à eau bouillante

Les réacteurs nucléaires à eau bouillante (REB) ont été développés par l’industriel américain General Electric dans le cadre du projet « Atoms for peace » (« Des Atomes pour la paix »). Aussi, ce dernier a longtemps eu le monopole de cette technologie, ce qui explique en partie son implantation plus modérée que le Réacteur à eau pressurisée (REP). Le premier réacteur de démonstration a été mis en service en 1957 en Californie.

La technologie n’a jamais été adoptée en France du fait de la politique d’indépendance énergétique du pays mise en œuvre par Charles de Gaulle d’une part et de l’orientation des travaux du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) d’autre part. Ils sont en revanche très communs au Japon (52% du parc nucléaire).

Dans un REB, la fission nucléaire produit une grande quantité de chaleur dans le cœur du réacteur. Cette chaleur permet de porter le caloporteur – ici l’eau ordinaire (H2O) – à ébullition, et la vapeur actionne une turbine couplée à un alternateur, ce qui permet de produire de l’électricité. Contrairement aux REP, ici il n’y a pas de circuit d’eau alimentaire secondaire, et l’eau chauffée est directement envoyée vers la turbine, avant d’être refroidie dans un condenseur pour redevenir liquide et être réinjectée dans le cœur du réacteur.

Cette dernière est neutrophage – elle capte donc une partie des neutrons émis durant la réaction nucléaire. Aussi, afin d’augmenter son efficacité il est nécessaire d’enrichir le combustion nucléaire employé afin de renforcer la fission (ici, de l’uranium, enrichi à un taux compris entre 2% et 4% [1])

Le REB utilise également un modérateur afin de refroidir l’eau du circuit dans le condensateur. Il s’agit là aussi d’eau ordinaire.

Afin de refroidir le cœur ou arrêter la fusion, les REB ne sont pas contrôlés à l’acide borique dissous mais avec des injections d’eau dans la cuve et un refroidissement externe de la cuve si besoin.

Des barres de contrôle sont prévues pour interrompre la fission en cas de dysfonctionnement. Elles ne sont pas disposées au-dessus du cœur du réacteur – place occupée par un séparateur eau vapeur – mais en dessous. Elles sont automatiquement remontées par des systèmes passifs grâce à une forte pression hydraulique en cas de besoin. Le système peut aussi être activé manuellement.

Le plus gros incident qui a affecté la filière REB découle du séisme de magnitude 9 au large du Japon, le 11 mars 2011. Ce dernier a provoqué un tsunami de 14 mètres de haut qui a déferlé sur la centrale de Fukushima Daiichi. Le désastre a provoqué une perte d’alimentation électrique prolongée des systèmes de sécurité, menant à la fusion partielle de trois réacteurs. L’incident a été classé au niveau 7 de l’échelle INES à cause de rejets radioactifs dans l’océan Pacifique [2]– le niveau le plus élevé, aussi retenu pour la catastrophe de Tchernobyl.

Le 12 octobre 2012, la compagnie d’électricité japonaise Tepco, qui exploitait la centrale, a admis avoir minimisé le risque de tsunami afin d’éviter une éventuelle fermeture, ce qui a permis à l’accident de se produire [3]. Les contrôles sur les REB ont depuis été sensiblement renforcés afin de prendre en compte les leçons de Fukushima.

Les REB présentent un certain nombre d’avantages :

  • Ils n’ont pas de problèmes de la gestion de teneur en acide borique du circuit primaire, puisqu’ils sont refroidis à l’eau ;
  • La pression dans le circuit d’eau est 2 fois moindre que les REP (78 à 80 bar) et sa température de fonctionnement est inférieure de 25 à 30 °C [4]. En outre, il n’y a qu’un seul circuit alimentaire, ce qui rend sa conception plus simple et réduit son coût de construction ;
  • La cuve sous pression est soumise à moins d’irradiation que dans un réacteur à eau sous pression ce qui renforce sa longévité ;
  • En outre, du fait de la pression réduite, sa consommation d’électricité l’est également, ce qui permet un rendement légèrement supérieur aux REP (environ 1% [5]) ;

Plus globalement, les délais de construction des REB sont moindres, mais la différence du coût de l’électricité est très faible.

L’enceinte de confinement du REB est le plus souvent sous atmosphère inerte ce qui réduit considérablement le risque d’incendie en cas d’accident grave. En revanche, cela crée des difficultés d’accès au compartiment réacteur, ce qui affecte la maintenance et l’exploitation du réacteur et crée un risque accru d’asphyxie des opérateurs.

Ces réacteurs ont toutefois également des inconvénients :

  • Il est Impossible de les recharger le combustible nucléaire sans arrêter le réacteur nucléaire – une procédure relativement longue – et plus globalement, leur gestion est plus complexe que le REP ;
  • Les barres de commande doivent être insérées par le bas, ce qui pourrait ne garantit pas un succès à 100% en cas de perte de puissance critique ;
  • La cuve de réacteur est environ 2 fois plus volumineuse que celle d’un REP ;
  • Le cœur du réacteur est plus difficile à fabriquer et à transporter pour garantir la séparation de la vapeur et la recirculation de l’eau saturée ;
  • L’irradiation de l’eau dans le cœur du réacteur s’étend au reste du circuit, ce qui complique sa maintenance, celle du hall turbine, et faute de barrière, expose davantage l’environnement à la radioactivité en cas d’incident grave qui provoquerait une fuite importante.

Il existe92 réacteurs à eau bouillante en exploitation dans le monde aujourd’hui, ce qui en fait le deuxième type de réacteur en exploitation le plus utilisé dans les centrales nucléaires au monde, avec 22% du parc total [6]. Ils se trouvent aux Etats-Unis, au Japon, en Allemagne, en Suède, en Finlande, en Russie et en Suisse.

La puissance totale installée des REB est actuellement de 570 à 1300 MWe [7].