Quelle place pour le gaz dans la transition énergétique ?
Une étude de France Stratégie de septembre 2018
Le gaz occupe une position traditionnelle importante dans les transitions énergétiques françaises déjà effectuées : 19% de l’énergie finale contre 23% pour l’électricité. Il a surtout déplacé le charbon et le fuel, ce qui constitue indéniablement un progrès, mais représente malgré tout aujourd’hui 20% de nos émissions de gaz carbonique, et n’est donc pas aussi « vert » que certains le prétendent…
France-Stratégie, héritier du commissariat au plan, et conseiller du Premier Ministre, étudie les questions que poserait leur réduction dans une perspective de France zéro carbone. Le maintien du réseau de distribution et des stockages existants nécessiterait un minimum de 330TWh soit les deux tiers des volumes actuels de 450TWh.
Si en Amérique et en Angleterre la substitution du gaz au charbon dans la production électrique a pu contribuer à la réduction des émissions des systèmes électriques, la question se pose de façon radicalement différente en France dont le mix de production d’électricité est aujourd’hui déjà très décarboné avec un petit nombre de centrales au charbon en fonctionnement jusqu’en 2022 et un volant résiduel de centrales au gaz (respectivement, 1,8 et 7,7% de notre production d’électricité)
En faisant l’inventaire des perspectives du gaz vert, France Stratégie constate qu’aujourd’hui que leurs coûts seraient 3 ou 4 fois plus importants que ceux du gaz importé. D’autre part la gazéification des ressources de biomasse disponibles a environ la moitié du rendement énergétique de leur utilisation dans des réseaux de chaleur.
Le coût du méthane fabriqué par les pilotes du « power to gaz » atteint 8000€/MWh soit 500 fois le prix du marché, cet écart étant hors de portée de mesures d’optimisation ou de progrès technologique à court et moyen terme.
Des prélèvements importants de bois à des fins énergétiques (entraînant éventuellement une augmentation parallèle de la consommation de bois d’œuvre) pourraient conduire cependant à une baisse du carbone stocké chaque année dans la forêt. Dans les scénarios réalisés par l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) et l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) en juin 2017 pour le ministère de l’Agriculture, la différence dans le stockage du carbone entre une exploitation beaucoup plus forte de la forêt (correspondant par exemple à un scénario 100 % gaz renouvelable et au développement de la pyro-gazéification) et un scénario opposé d’extension des surfaces forestières couplée à de moindres prélèvements, s’élève à plusieurs dizaines de MtCO2eq/an en faveur de ce dernier scénario. À titre de comparaison, la consommation de gaz naturel en France émet aux environs de 88 MtCO2/an.
France Stratégie conclut en appelant à un véritable débat sur l’avenir du gaz vert tenant compte de ces réalités et recommande de revoir la réglementation énergétique 2012 qui favorise l’emploi du gaz dans le logement neuf aux dépends de l’électricité, en prenant comme critère principal les émissions de gaz carbonique, en cohérence avec la priorité affichée des enjeux climatiques.

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