Newsletter Juin 2019

Qui participe à la démocratie participative?

Chères Voix,

En ce joli mois de Juillet, nous fêtons l’arrivée de la newsletter de Juin avec un sujet dont vous avez tous entendu parler, mais auquel probablement peu d’entre vous ont encore contribué : le XJRGLUJDBL. Non, presque. Le PNGMDR.

Pourquoi je dis ça ?

Parce que LE DEBAT EST SATURÉ PAR LES ANTI-NUCLEAIRES

Quelqu’un qui se reconnaîtra chuuuuuut, au Ministère chuuuuuut, m’a pourtant dit, je cite de mémoire : « c’est la première fois que nous soumettons au public, dans son intégralité, un enjeu aussi technique et aussi critique pour la filière [nucléaire]. On est … » (la suite je la garde secrète ?)

Trois d’entre nous s’y sont collés et n’ont pas été déçus.

La démocratie, prétendument défendue, scandaleusement bafouée.

C’est le paradoxe vécu le 28 mai dernier à Lille dans le cadre du débat public pour le Plan National de Gestion des Matières et des Déchets Radioactifs. Trois organisations anti-nucléaires ont entravé le débat qui devait permettre aux personnes présentes d’échanger, critiquer, s’informer, défendre, expliquer … De tout ceci, il n’a rien été.

L’énergie, ainsi que la capacité à en disposer à la demande, constituent aujourd’hui les pierres angulaires de notre société. En 2019, c’est dans l’ombre grandissante du changement climatique que la France se prépare à publier, au travers de la PPE, sa stratégie énergétique, socle de son avenir.

C’est dans ce contexte que la 5ème édition du PNGMDR est soumise, pour la première fois, à la procédure du débat public du 17 avril au 25 septembre 2019. En plus de la plateforme en ligne dédiée, des manifestations publiques sont organisées pour permettre aux citoyens de s’informer, de poser leurs questions et de donner leurs avis.

Mais à quoi sert toute cette organisation quand il n’est même pas possible de discuter ? Comment faire des choix, cruciaux pour l’avenir de toutes et tous, se forger une opinion rationnelle sur les problématiques d’ordre économiques, sanitaires, environnementales ou encore sociales quand le débat est confisqué ?

Car le débat du 28 mai à Lille a été confisqué quand la présidente de la commission du débat public sur le PNGMDR, Isabelle Harel-Dutirou, « a mis fin au débat » après avoir constaté « l’impossibilité de poursuivre un débat public équilibré ». Tout en « regrett[ant] que des personnes se présentant comme des membres d’associations antinucléaires aient empêché des citoyens et participants au débat public de s’informer, de poser des questions, d’apporter des éléments de réponse et d’exprimer leurs opinions lors de cette réunion ».

Trois collectifs se réclamant de la défense de l’environnement et de la démocratie (Lilleradiée, ANV-COP21 et Extinction Rebellion) ont choisi de « boycotter » la rencontre. Par boycotter, il faut comprendre paralyser toute communication : cris, chansons, banderoles, sifflets, applaudissement assourdissants, monopolisation de la parole, affirmations telles que « Le débat on en veut pas », « Save our children », « on est pas là pour participer au débat », « ni risque climatique, ni risque nucléaire » ou encore « annulons la réunion » etc…

On notera en particulier la déclaration : « On assume complètement de boycotter activement le débat, d’empêcher la parole, d’empêcher toute parole démocratique … », à 13’36 sur la vidéo. Nous pourrions presque arrêter là ce texte, tant tout y est dit…

A quel moment, peut-on prétendre défendre un idéal démocratique en assassinant la discussion?

Quid du droit à l’information bafoué, de la liberté d’expression entravée ou encore de la liberté de réunion niée ?

Le débat est par essence, une des formes de la démocratie. Le nier ou l’empêcher c’est la rejeter ni plus, ni moins et céder au totalitarisme voire au terrorisme intellectuel.

Ces actions ont pour seuls effets (ou objectifs ?) de limiter l’accès à la connaissance au profit d’une seule pensée. Pour cela, les militants s’attachent à culpabiliser, à discréditer, déplacer le débat sur le champ de l’affect. Les champs lexicaux liés à la peur sont surexploités. Les générations futures sont instrumentalisées. La colère est érigée en argument, ce qu’Anne-Cécile Robert nomme « la stratégie de l’émotion ».

C’est l’antagonisme par excellence de l’Esprit des Lumières qui prônait l’émancipation de l’individu grâce à son autonomie et sa liberté de penser le monde de manière rationnelle. En lieu et place de cela, nous subissons le tribalisme grégaire d’individus repliés sur eux même.

Le soir du 28 mai, point de gagnant, seuls des perdants sont ressortis du Gymnase de Lille.

Quand des individus commettent des actions violentes comme saboter des installations électriques pour interrompre le trafic ferroviaire aux alentours d’installations d’Orano (Ex-Areva) début juin, leurs actes contredisent leur positionnement de défenseur autoproclamé de l’intérêt général. Celui-ci est pourtant régulièrement et encore récemment trahi : incendie volontaire du musée Urêka en 2014, d’un hôtel-restaurant à Bure en 2017, déraillement revendiqué par un militant anti-nucléaire d’un train en 2013 ou encore attaque au lance-roquettes contre la centrale de Creys-Malville en 1982 par un militant écologiste …

Quel est donc le niveau de responsabilité de ces ONGs qui matraquent les mêmes slogans et sous-entendus depuis près de 50 ans ? Quelle éthique les pousse à répéter à outrance des dogmes anti-nucléaires entretenant la désinformation et une atmosphère anxiogène ? L’écho qu’elles trouvent par ailleurs si facilement est-il bien approprié…?

Les médias et le monde politique ont le rôle de s’extraire et de nous extraire des ornières émotionnelles, plutôt que de nous y enfoncer. Les premiers doivent retrouver leur rôle de fournisseur de grilles de compréhension au grand public. Les seconds doivent éclairer leurs décisions en cessant de gérer la société à cause de ou par l’émotion. Tous doivent pouvoir s’appuyer sur ce que nous indiquent la science et la méthode scientifique sans pour autant chuter dans l’idéologie techniciste et le scientisme aveugle.

André Bellon écrivait qu’il n’existait pas de démocratie sans conflit. Certes, mais la violence ne doit pas en être le moyen d’expression.

C’est une épreuve sans précédent imposée à l’humanité, et à chacun d’entre nous, que de remettre le rationnel au centre des décisions, laissant l’affect à sa place. Veiller à ramener les faits comme structure des débats, en amont des opinions et des envies.

C’est pourquoi nous vous invitons à vous investir dans le débat, et à faire valoir nos voix. Il reste encore quelques semaines, ponctuées de réunions publiques, et la plateforme restera ouverte jusqu’en Septembre.

Il est temps de réinvestir le débat, et de faire entendre nos arguments.

Pour ce faire, rien de plus simple. Il suffit d’aller aux manifestations (aucune inscription nécessaire), ou de déposer des avis sur la plateforme.

On compte sur vous.